Assurance-vie : faut il favoriser une souscription simple ou co-souscription pour les époux ?
Lorsqu’il s’agit de souscrire un contrat d’assurance-vie, plusieurs options s’offrent aux couples mariés en communauté. Ils peuvent choisir entre une souscription simple, où chaque époux gère son propre contrat ,ou une co-souscription, où un seul contrat est souscrit par les deux époux.Chaque option présente des avantages et des inconvénients tant au niveau juridique que fiscal. Cet article explore ces différentes possibilités afin d’aider les couples à prendre la meilleure décision.
Co-souscription avec dénouement au premier décès
Fiscalement
Sur le plan fiscal, la co-souscription offre un seul abattement fiscal de 152 500 € par bénéficiaire si les versements ont été effectués avant les 70 ans du premier époux décédé. En cas de versements après cet âge, l’abattement passe à 30 500 €.
Juridiquement
Dans ce scénario, le contrat d’assurance-vie est co-géré par lesdeux époux. Cela signifie que toutes les décisions concernant le contrat, comme les retraits, les arbitrages ou la désignation des bénéficiaires, doivent être prises d'un commun accord. Toutefois, l’un des époux peut renoncer à la souscription sans l’accord de l’autre, cette action étant considérée comme un acte d’administration.
Le principal inconvénient de cette option apparaît au moment du décès. Si le bénéficiaire du contrat est le conjoint survivant, les enfants issus d’un autre mariage peuvent contester la situation, notamment en cas de primes jugées excessives ou de donations déguisées. Cela pourrait entraîner des conflits successoraux complexes. En revanche, si un autre bénéficiaire est désigné, aucune compensation n’est due au conjoint survivant, car le choix des bénéficiaires a été décidé conjointement par les deux époux.
Co-souscription avec dénouement au second décès
Fiscalement
En matière d’abattement, la co-souscription avec dénouement au second décès fonctionne de manière similaire à celle avec dénouement au premier décès : un abattement de 152 500 € par bénéficiaire pour les versements avant les 70 ans du second époux décédé, ou 30 500 € pour les versements effectués après cet âge.
Juridiquement
Ici, le contrat reste en vigueur jusqu’au décès du second époux.Cela peut être avantageux, car le conjoint survivant conserve la pleine gestion du contrat, évitant ainsi les problèmes liés à la cessation du contrat au premier décès. Cette option permet de maintenir une certaine continuité dans la gestion du patrimoine.
Toutefois, les enfants non communs peuvent intenter une action en retranchement. Cette action permet de contester une assurance-vie si elle est jugée excessive et porte atteinte à leur part réservataire, surtout lorsque le contrat attribue un avantage matrimonial au conjoint survivant (par exemple, encas de clause d’attribution intégrale).
Souscription simple
Juridiquement
La souscription simple consiste à ce que chaque époux souscrive son propre contrat d’assurance-vie. Cela permet à chacun de gérer son contrat de manière indépendante, sans avoir à obtenir l’accord de l’autre. Cette option est particulièrement avantageuse en cas de divorce ou si l’un des époux devient incapable de prendre des décisions.
De plus, en cas de divorce, chaque époux conserve son contrat, ainsi que l’antériorité fiscale accumulée, même si la valeur des contrats entre dans le calcul de la communauté.
Fiscalement
L’un des principaux avantages de la souscription simple est la possibilité de doubler les abattements fiscaux. Chaque époux bénéficie de son propre abattement de 152 500 € par bénéficiaire (pour les versements avant les70 ans) ou 30 500 € (pour les versements après 70 ans).
Notre avis
D'un point de vue juridique et fiscal, la souscription simple est souvent la solution recommandée. Elle offre plus de flexibilité et permet de maximiser les avantages fiscaux tout en évitant les complications juridiques liées à la gestion d'un contrat co-souscrit. Bien que la co-souscription puisse avoir des avantages dans certaines situations, notamment pour maintenir le contrat après le décès du premier époux, elle présente des inconvénients significatifs, particulièrement en matière de gestion et de fiscalité.
Références
RM Ciot JOAN 23 févr. 2016 n° 78192
RM Malhuret 10 janv. 2019 JO Sénat n° 00256
Cass. civ. 1, 19 mars 2015 n° 13-28776
Lexique
Abattement fiscal : Réduction appliquée sur la base imposable, ici il s'agit de la somme qui est déduite des montants soumis à l'imposition lors de la transmission d'un contrat d'assurance-vie.
Action en retranchement : Procédure permettant à un héritier réservataire de récupérer sa part légale lorsque celle-ci a été amputée par des donations ou assurances-vie excessives.
Clause bénéficiaire : Disposition dans un contrat d'assurance-vie où l’assuré désigne la ou les personnes qui percevront le capital ou la rente en cas de décès.
Co-souscription : Situation où deux personnes souscrivent ensemble un même contrat d'assurance-vie.
Dénouement du contrat : Moment où le contrat prend fin, généralement au décès de l'assuré, et où les sommes sont versées aux bénéficiaires.
Réserve héréditaire : Part de la succession réservée de droit aux héritiers réservataires (enfants principalement), à laquelle il n’est pas possible de déroger par testament ou donation.